Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

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Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par chibougue » 04 sept. 2017, 07:18

Vendredi prochain, Roscoe sort déjà un nouvel album sur Wild Hive Records. Ça s'intitule Discussions et il y reprend des pièces créées avec Craig Taborn et Kikanju Baku, mais avec un orchestre d'une vingtaine de musiciens. Il ne se repose jamais, ce Roscoe!

http://www.widehive.com/discography/discussions

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par chibougue » 20 août 2017, 23:24

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par chibougue » 20 août 2017, 20:33

jon8 a écrit :
20 août 2017, 19:29


Bon, eh bien j'aime ça :excellent:
Oh yah! :thumbup:

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par jon8 » 20 août 2017, 19:29



Bon, eh bien j'aime ça :excellent:

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par chibougue » 07 août 2017, 07:11

Merci les gars. En effet, la musique de Mitchell peut être diantrement intense. Les amateurs de sensations fortes y trouveront leur compte.

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par VanBasten » 06 août 2017, 23:04

En effet superbe texte et Jon8 je te préviens Mitchell ça peut être assez intense ...

Re: Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par jon8 » 06 août 2017, 23:02

Excellent texte, Chibougue. Bravo et merci: je connais peu Mitchell et ça donne le goût d'écouter :excellent:

Bells for the South Side: l'Oeuvre-Somme de Roscoe Mitchell

par chibougue » 06 août 2017, 21:17

Roscoe Mitchell est un monument. En 1966, il faisait paraître Sound, disque révolutionnaire et première parution de l'AACM (Association for Advancement of Creative Musicians). L'association, fondée l'année précédente par Muhal Richard Abrams avec l'intention de donner un coup de main aux musiciens et compositeurs de jazz d'avant-garde de Chicago, compte dans ses rangs des figures aussi importantes que Wadada Leo Smith, Henry Threadgill, Anthony Braxton et Jack DeJohnette.

Il a ensuite fondé une des formations les plus vitales de l'histoire du jazz: le Art Ensemble of Chicago (appelée tout d'abord le Roscoe Mtchell Art Ensemble). Recherche, théâtralité, ludisme, énergie et folie furieuse ont défini le Art Ensemble. Les membres du groupe jouaient d'ailleurs joyeusement bariolés, maquillés ou masqués à l'exception de Mitchell. Lui, c'était le gars sérieux, le cérébral, la tête chercheuse de la bande.



Et tête chercheuse, il est demeuré. Sa carrière, que ce soit avec le Art Ensemble ou en solo, est une incessante quête de l'inconnu musical, une constante remise en question des frontières qui existent entre le jazz et la musique contemporaine occidentale. La relation entre l'improvisation du jazz et la composition telle que préconisée par les grands compositeurs modernes est au centre de ses préoccupations. Sa discographie, qui s'étend maintenant sur plus de cinquante ans, est fascinante.

Bell from the South Side, son nouvel album venant tout juste de paraître sur étiquette ECM, pourrait être vu comme une oeuvre-somme. Il est né suite à une demande du Museum of Contempory Art Chicago qui organisait une exposition pour souligner le cinquantième anniversaire de l'AACM. Les musiciens ont donc pu jouer sur des instruments ayant appartenu aux membres du Art Ensemble. Je ne sais pas si ces instruments y sont pour quelque chose, mais le disque évoque par moments le son de la légendaire formation. Nous ne sommes toutefois pas dans la nostalgie. Fidèle à son habitude, Roscoe Mitchell, maintenant âgé de soixante-dix-sept ans, continue de regarder en avant.



Pour ce nouvel opus, il a eu l'idée de génie de combiner les huit musiciens issus de ses quatre trios. Chacun des trios à son moment sur le disque. Sur l'autre moitié des compositions, Mitchell crée de nouveaux agencements entre ces instrumentistes.

Le trio que Mitchell forme avec le surprenant batteur et pianiste Tyshawn Sorey et le trompettiste Hugh Ragin présente la composition pour vents (Sorey y joue du trombone!) Prelude to a Rose. Elle s'inspire à la fois du jazz de chambre et de la musique baroque. Rien d'étonnant: Mitchell et le Art Ensemble reprenaient déjà Monteverdi au début des années soixante-dix.

Il y a quelques années, le batteur britannique Kikanju Baku écrivait un courriel à Mitchell pour lui proposer de jouer avec lui. Audacieux, le jeune homme! C'est de cette façon qu'est né le trio de Mitchell avec Baku et l'excellent pianiste Craig Taborn. Leur morceau de bravoure intitulé Dancing in the Canyon débute tout doucement avec des tintements de percussions métalliques (on trouve toujours beaucoup de percussions dans l'univers de Mitchell) et se termine par de l'improvisation free jazz particulièrement débridée. Taborn y est aussi décoiffant que Cecil Taylor et Baku joue de sa batterie comme si elle était une mitrailleuse

Avec Jaribu Shahid (contrebasse) et Tani Tabbal (batterie), Mitchell forme un trio de vieux routiers. Ces gars-là jouent ensemble depuis des décennies et ça s'entend! Sur la pièce qu'ils interprètent sur ce disque, les choses commencent en beauté avec Shahid qui accompagne le saxophone de Mitchell en frottant les cordes de son instrument avec un archet. Ensuite, vient une longue section de batterie solo jouée par Tabbal qui exécute une partition aléatoire que Mitchell a rédigée sur des cartes. Ça se termine avec tout le trio en action.

Le trio avec William Winant (percussions) et James Fey (saxophones, sons électroniques) est le plus intellectuel des quatre. Winant et Fey sont des collègues de Mitchell à la faculté de musique de l'université d'Oakland où il enseigne. Sur les ambiances mystérieuses créées par ses deux collègues. Mitchell y va de prouesses renversantes au saxophone. On ne souligne jamais assez ce côté virtuose de Mitchell. On retrouve sur ce disque des passages où il joue avec une vélocité hallucinante et d'autres où, grâce à la technique du souffle circulaire, il joue des notes qui ne semblent jamais finir. Avis aux hipsters: Colin Stetson n'a rien inventé!



Sur les autres morceaux de l'album, où on retrouve un peu tout le monde, on se promène pas mal. Les premières compositions du disque sont plus près de la musique contemporaine que du jazz. Elles m'ont fait penser à Morton Feldman, Karlheiz Stockhausen ou György Kurtag par exemple. Un peu plus loin, EP 7849 est la pièce la plus étonnante du disque. Jaribu Shahid y créé, à la basse électrique, des drones terrifiants que nourrissent les autres musiciens. Nous ne sommes alors pas loin de Sunn o))). Du jamais entendu chez Mitchell!

L'album se conclut avec une reprise d'une pièce du Art Ensemble of Chicago: Odwalla, une composition sur laquelle Mitchell se rapproche d'un jazz plus traditionnel. Ça boucle la boucle à merveille: après nous avoir fait voyagé d'un monde sonore à l'autre, Mitchell nous montre d'où il vient. Je le répète, Bells for the South Side est une oeuvre-somme. C'est aussi une très bonne introduction à l'univers d'un créateur qui, comme ses collègues de l'AACM Anthony Braxton et George Lewis, n'a rien à envier à des compositeurs issus du milieu de la musique classique contemporaine tels que Cage, Boulez, Kurtag et Stockhausen. À quand la reconnaissance?


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