Le mot brûlé: COMPLOTISTE

par jon8

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jon8
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Inscription : 15 avr. 2017, 00:26

23 nov. 2020, 15:17

Les participants sont des hommes et des femmes de 20 à 50 ans, issus de tous les milieux et avec différents niveaux d'éducation. L'expérience telle que présentée met en jeu trois personnages :
  • un élève ( learner ), qui s'efforce de mémoriser des listes de mots et reçoit une décharge électrique en cas d'erreur
  • un enseignant ( teacher ), qui dicte les mots à l'élève et vérifie les réponses. En cas d'erreur, il envoie une décharge électrique destinée à faire souffrir l'élève
  • un expérimentateur ( experimenter ), qui représente l'autorité officielle, vêtu d'une blouse grise du technicien, et sûr de lui.

L'expérimentateur et l'élève sont en réalité deux comédiens

L'enseignant, qui est le seul sujet de l'expérience réelle visant à étudier le niveau d'obéissance, ou encore la "soumission à l'autorité" se voit décrire les conditions de l'expérience portant soi-disant sur la mémoire. On l'informe qu'un tirage au sort avec l'autre participant leur attribuera le rôle d'élève ou d'enseignant. On le soumet à un léger choc électrique de 45 volts pour lui montrer quel type de souffrance l'élève peut recevoir, et pour renforcer sa confiance sur la véracité de l'expérience. Une fois que le cobaye a accepté le protocole, un tirage au sort truqué est effectué, qui le désigne systématiquement comme enseignant.

L'élève est placé dans une pièce distincte, séparée par une fine cloison, et attaché sur une chaise électrique (en apparence). L'enseignant-cobaye est installé devant un pupitre muni d'une rangée de manettes et reçoit la mission de faire mémoriser à l'élève des listes de mots. À chaque erreur, l'enseignant doit enclencher une manette qui, croit-il, envoie un choc électrique de tension croissante à l'apprenant (15 volts supplémentaires à chaque décharge, selon ce qui est écrit sur le pupitre). Le sujet est prié d'annoncer à haute voix la tension correspondante avant de l'appliquer. Naturellement, les chocs électriques sont fictifs.

Les réactions aux chocs électriques sont simulées par l'apprenant. Le comédien qui simule la souffrance a reçu les consignes suivantes : à partir de 75 V, il gémit; à 120 V, il se plaint à l'expérimentateur qu'il souffre; à 135 V, il hurle; à 150 V, il supplie d'être libéré; à 270 V, il lance un cri violent; à 300 V, il annonce qu'il ne répondra plus. Lorsque l'apprenant ne répond plus, l'expérimentateur indique qu'une absence de réponse est considérée comme une erreur. Au stade de 150 volts, la majorité des enseignants-sujets manifestent des doutes et interrogent l'expérimentateur qui est à leur côté. L’expérimentateur est chargé de les rassurer en leur affirmant qu'ils ne sont pas tenus pour responsables des conséquences. Si un sujet hésite, l'expérimentateur a pour consigne de lui demander d'agir.

L'apprenant s'écrie « Je ne veux pas continuer ! » en s'adressant au sujet ( simulation ).
Si un sujet exprime le désir d'arrêter l'expérience, l'expérimentateur lui adresse, dans l'ordre, ces réponses :

« Veuillez continuer s'il vous plaît. »
« L'expérience exige que vous continuiez. »
« Il est absolument indispensable que vous continuiez. »
« Vous n'avez pas le choix, vous devez continuer. »

Si le sujet souhaite toujours s'arrêter après ces quatre interventions, l'expérience est interrompue. Sinon, elle prend fin quand le sujet a administré trois décharges maximales (450 volts) à l'aide des manettes intitulées « XXX » situées après celles faisant mention de « Attention, choc dangereux »

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23 nov. 2020, 15:27

Rôle de l’obéissance dans la société
L'obéissance à une autorité et l'intégration de l'individu au sein d'une hiérarchie est l'un des fondements de toute société. Une société a des règles, et par voie de conséquence il existe une autorité, qui permet aux individus de vivre ensemble et empêche que leurs besoins et désirs entrent en conflit et mettent à mal la structure de la société. Ayant posé cela, Stanley Milgram ne considère pas l'obéissance comme un mal. Pour résumer sa pensée, ce qui est dangereux, c'est l'obéissance aveugle.

Un moteur de l'obéissance est selon lui le conformisme. Lorsque l'individu obéit à une autorité, il est conscient de réaliser les désirs de cette autorité. Avec le conformisme, l'individu est persuadé que ses motivations lui sont propres et qu'il n'imite pas le comportement du groupe. Ce mimétisme est une façon pour l'individu de ne pas se démarquer du groupe. Le conformisme a été mis en évidence par le psychosociologue Solomon Asch dans son expérience réalisée dans les années 1950. Les variantes de l'expérience de Milgram avec plusieurs pairs "désobéissants" ont montré que le sujet se range alors le plus souvent du côté du groupe et n'obéit plus lui non plus. Ainsi, si l'obéissance d'un groupe veut être assurée, il faut faire en sorte que la majorité de ses membres adhère aux buts de l'autorité.

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23 nov. 2020, 15:30

Rôle de la tension
Le maintien de l'individu dans un état agentique dure aussi longtemps que s'exerce le pouvoir de l'autorité et qu'elle n'entre pas en conflit avec le comportement du groupe (le conformisme) et un certain niveau de tension ou d'anxiété personnel.

La tension que ressent l'individu qui obéit est le signe de sa désapprobation à un ordre de l'autorité. L'individu fait tout pour baisser ce niveau de tension ; le plus radical serait la désobéissance, mais le fait qu'il ait accepté de se soumettre l'oblige à continuer à obéir. Il fait donc tout pour faire baisser cette tension, sans désobéir. Dans l'expérience de Milgram, des sujets émettent des ricanements, désapprouvent à haute voix les ordres de l'expérimentateur, évitent de regarder l'élève, l'aident en insistant sur la bonne réponse ou encore lorsque l'expérimentateur n'est pas là ils ne donnent pas la décharge convenable exigée. Toutes ces actions visent à faire baisser le niveau de tension. Lorsqu'il n'est plus possible de le faire diminuer avec ces subterfuges, le sujet désobéit purement et simplement.

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23 nov. 2020, 15:34

Il finit d'ailleurs son livre en faisant sienne une citation de Harold Laski :

« … la civilisation est caractérisée, avant tout, par la volonté de ne pas faire souffrir gratuitement nos semblables. Selon les termes de cette définition, ceux d'entre nous qui se soumettent aveuglément aux exigences de l'autorité ne peuvent prétendre au statut d'hommes civilisés. »

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23 nov. 2020, 15:48

Tomahack a écrit :
23 nov. 2020, 13:11
Pentoute. Wrong. Tout le contraire. La recherche de la vérité vs la perception de détenir la vérité. Toute la différence est là. Science vs religion.
Le problème avec la Science, et peut-être ce qui fait sa force ET sa faiblesse principale, c'est le fait qu'elle baigne systématiquement dans le doute.

La véritable approche scientifique demande de douter, toujours.

Oh bien sûr, il y a des fondations, mais rien de totalement irréfutable. Rien d'absolu. C'est une belle flexibilité qui permet d'éviter les pièges du dogme, mais en même temps les gens détestent le doute et l'incertitude.

La recherche de la vérité V.S. la perception de détenir la vérité?

Ah oui, vraiment, Tom?

Explique-moi. Si la vérité absolue est inatteignable, alors la recherche de la vérité est un piège à con? Une roue de hamster?

N'importe qui, à un moment ou un autre, a besoin de cimenter une vérité. C'est essentiel pour prendre des décisions, et donc agir, se mettre en mouvement.

Bref, beaucoup plus facile de vendre et d'adopter la religion que la science. Et, on le voit ici pendant la pandémie, la science n'est pas adoptée comme la science, elle est adoptée comme une religion!

Fascinant, non?


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Tomahack
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23 nov. 2020, 16:50

Explique-moi. Si la vérité absolue est inatteignable, alors la recherche de la vérité est un piège à con? Une roue de hamster?
Non. C'est ce qui permet de se déplacer du point A au point B. N'est-ce pas le principe même de l'évolution? Les dogmes qui se fondent sur des vérités absolue n'évoluent justement pas comme le témoigne les multitudes de religions, voilà le piège à cons par excellence.

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23 nov. 2020, 17:28

Tomahack a écrit :
23 nov. 2020, 16:50
Explique-moi. Si la vérité absolue est inatteignable, alors la recherche de la vérité est un piège à con? Une roue de hamster?
Non. C'est ce qui permet de se déplacer du point A au point B. N'est-ce pas le principe même de l'évolution? Les dogmes qui se fondent sur des vérités absolue n'évoluent justement pas comme le témoigne les multitudes de religions, voilà le piège à cons par excellence.
Ce que je veux dire c'est que:

La recherche de la vérité vs la perception de détenir la vérité.

...est une illusion. Il n'y a pas de "noblesse'' dans la recherche de la vérité, ce n'est pas une finalité en soi, c'est seulement un état transitoire.

C'est TOUJOURS une perception de détenir la vérité. Soit tu la recherche et ne l'atteint pas, soit tu as la perception de l'avoir trouvé et de la détenir.

Doute V.S. Certitude.

Les gens les plus impuissants et malheureux que j'ai vu dans ma vie ce sont les indécis. Ils sont pognés dans les limbes du doutes dans l'attente éternelle d'une réponse (divine ou autre) qui ne viendra jamais. C'est une condamnation à l'insatisfaction perpétuelle, ce qui devient la pire des prisons.

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23 nov. 2020, 17:32

Encore une fois: nuance.

Il y a des degrés dans tout, y compris sur ça.

Par exemple, je m'affiche comme ''agnostique'' mais dans les faits, dans ma tête, dans mon coeur, je penche plus sur la croyance de quelque chose de supérieur, même si je n'adhère à aucune religion.

L'important c'est que ça ne m'empêche pas d'être fonctionnel, dans la vie quotidienne. Le problème c'est lorsque le dogmatique ou le doute (chacun à sa manière insidieuse) commence à polluer ta vie de tous les jours...

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23 nov. 2020, 17:44

Si je prend un exemple concret, que tu vas bien comprendre.

Nous aimons tous les deux construire des haut-parleurs. Peut-être plus que l'audio comme tel, mais peu importe, nous aimons jouer avec les speakers.

Là, nous étions dans un environnement social audiophile qui est une représentation quasi-parfaite d'un cercle religieux ou sectaire. Les ressemblances étaient fascinantes. Et épeurantes.

Un moment donné ça devient un frein, puisque ça bloque notre évolution, en tant qu'adepte de construction de haut-parleur ou même carrément de simple audiophile du 21e siècle avec un désir d'évoluer dans le hobby, selon des bases minimalement scientifiques...

On décide de se ''rebeller'' et de pousser vers des tests et des expérimentations. Les résultats ont choqués. Sans se faire ''bannir'' du clan, c'est à peu près ce qui est arrivé...

Et, peu importe, nous nous sommes nous-mêmes distanciés de ce milieu. Pour plein de raisons valables.

Notre perception de la vérité est devenue trop différente de la perception de la vérité du cercle des audiophiles. Dans un monde idéal, c'est sans conséquence, puisque l'audiophilie est un sport qui se pratique assez bien seul (!!) mais dans les faits, ça déracine presque tout du plaisir de prendre un système de son pour en faire un hobby V.S. l'utiliser comme un simple produit de consommation ou un outil de reproduction musicale.

Mais, et je pose la question le plus sérieusement du monde, qui est le hobbyiste le plus heureux en ce moment? Le pompon qui trippe sur ses câbles et ses gugusses ou celui, comme nous, qui est bloqué par le fait que tout le cercle audiophile est sclérosé ?

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23 nov. 2020, 17:58

C'est TOUJOURS une perception de détenir la vérité. Soit tu la recherche et ne l'atteint pas, soit tu as la perception de l'avoir trouvé et de la détenir.

Doute V.S. Certitude.

Les gens les plus impuissants et malheureux que j'ai vu dans ma vie ce sont les indécis. Ils sont pognés dans les limbes du doutes dans l'attente éternelle d'une réponse (divine ou autre) qui ne viendra jamais. C'est une condamnation à l'insatisfaction perpétuelle, ce qui devient la pire des prisons.

À l'inverse, j'ai été témoin de l'opposé: s'emprisonner soi-même dans la certitude. Mon père, pourtant fin psychologue, beaucoup plus proche du génie que de la folie, est tombé dans le piège de penser toujours avoir raison de manière si intense qu'il pouvait écraser tout sur son passage. L'archétype du rebelle intellectuel, je ne l'ai jamais vu perdre une seule joute verbale, un maitre du judo mental. Un don qui allait provoquer sa perte.

En vieillissant, probablement vers l'âge de 50 ou 55 ans, il a commencé à voir le poids de la solitude peser dans sa vie. Aucune femme ne pouvait l'endurer et ses seuls amis étaient ses clients. Au lieu de comprendre qu'il y avait une certaine balance à atteindre entre le doute et la certitude, ne serait-ce que pour entretenir ses relations humaines, il a poursuivi dans la voie de la certitude, celle que l'on martèle, à tort ou à raison, jusqu'à enlever à tout le monde le goût de discuter avec lui ou même d'être en sa compagnie. Il croyait en un seul dieu, lui-même.

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03 déc. 2020, 10:51

Et on m’a répondu : « surtout, surtout tu ne parles pas du complot ».

Alors évidemment j’ai envie de commencer par ça !

Pierre :

Allez-y, allez-y

C’est quartier libre !

Ariane :

Premièrement, il y a une constante dans l’Histoire de l’humanité, c’est que ceux qui ont des privilèges au détriment de ceux qui n’en ont pas, se sentent persécutés par ceux qui n’en ont pas, parce que ceux qui n’en ont pas et qui sont plus nombreux pourraient éventuellement se rendre compte qu’ils ont confisqué des privilèges, et même, pourquoi pas les tuer.

Et donc, ils organisent des complots contre ceux qui n’en ont pas.

Pierre :

C’est de la paranoïa ?

Ariane :

Alors, on va voir

C’est l’Histoire de l’humanité, sauf qu’il y a quelque chose d’absolument inédit aujourd’hui, c’est qu’on n’a pas le droit de le penser.

Et que toute pensée sur cette question est criminalisée.

Alors, pourquoi la pensée elle est criminalisée ?

Pour éviter de penser les crimes. C’est tout simplement cela.

Donc que se passe-t-il ?

Nous avons, un point qui m’intéresse énormément, la question de la corruption du langage ou de la perversion du langage, pour précisément aider à la contagion délirante et à la propagande.

Nous avons des néologismes aujourd’hui, comme « complotiste », comme « théorie du complot », ou comme « conspirationniste ».

Je rappelle que cette année quand même, grande première, le philosophe Giorgio Agamben, qui est un philosophe italien extrêmement connu, a été classé conspirationniste.

Alors, cela rejoint un petit peu ce que j’ai dit, c’est-à-dire que les philosophes, dans la philosophie morale, n’ont eu de cesse que de dénoncer les complots qui étaient faits contre les peuples, et avec des conseillers… Machiavel est un conseiller du complot.

Socrate quand il s’affronte aux oligarques, il est en train de dénoncer en fait un complot.

Antigone quand elle dénonce ce qui se passe avec Créon, elle est en train de dénoncer un complot.

Et donc aujourd’hui, c’est très intéressant, car je crois que ce terme à lui tout seul résume tout.

On a « complotiste », « conspirationniste », « théorie du complot », ça veut dire celui qui pense des complots, mais en fait on ne nous dit pas si ces complots sont vrais ou sont faux !

Parce que si ces complots sont vrais, celui qui pense ces complots est un philosophe. Ou un résistant.

Si ces complots sont faux, c’est un paranoïaque.

Et le paranoïaque c’est l’inverse du philosophe.

Donc le paranoïaque, c’est qui ?

C’est un fou délirant qui, parce qu’il se sent persécuté, complote contre ceux, contre ceux dont il estime qu’ils le persécutent.

Mais pourquoi il se sent persécuté par eux ?

Parce qu’en réalité il se sent persécuté par son propre sentiment d’illégitimité, son propre sentiment de culpabilité.

Donc dans le même mot, nous avons tout et son contraire.

C’est-à-dire que là on est en train de défier totalement la logique de base qui fonctionne sur le principe de non-contradiction, c’est-à-dire : on ne peut pas affirmer une chose et son contraire à la fois.

Eh bien aujourd’hui, nous avons a minima trois mots, mais beaucoup plus dans ce langage que l’on n’arrête pas de nous corrompre, trois mots qui veulent dire à la fois tout et son contraire.

De sorte que, qu’est-ce qu’il se passe avec le langage paradoxal ?

D’ailleurs le langage paradoxal est le langage préféré des pervers.

Il faut quand même le dire, c’est-à-dire que le paradoxe est le langage privilégié des pervers.

Pourquoi ?

Parce qu’à la fin, cela vous crée des nœuds dans la pensée, vous êtes sidérés, vous ne comprenez plus rien, et comme vous êtes sidérés, non seulement vous ne pensez plus, mais vous n’agissez plus, vous restez bloqués.

Donc on a là une situation je dirais tout à fait inédite où aujourd’hui qui veut penser est criminel.

C’est-à-dire, on met en doute, cela ne veut pas dire que l’on va prendre un chemin ou un autre, mais la pensée, elle fonctionne par la dialectique, c’est-à-dire, j’ai besoin de penser une chose, j’ai besoin ensuite de penser son contraire, et ensuite, chacun a le droit de se forger sa propre opinion, son propre esprit critique.

Et tout ça, ça nous est confisqué, c’est-à-dire qu’aujourd’hui on a une pensée monolithique, qui est :

Premier principe : « il y a un virus extrêmement dangereux qui menace la survie de l’espèce humaine », donc ça on n’a pas le droit de l’interroger.

Les moyens mis en œuvre pour lutter contre ce premier principe c’est-à-dire : « on vous supprime toutes vos libertés, on vous supprime tous vos droits, on vous supprime tout ce qui vous humanise, la socialisation, les fêtes, la rencontre, le toucher, les funérailles, on pourra en reparler des funérailles », on vous supprime tout ce qui vous humanise, et pire, on vous met dans la détresse la plus absolue. C’est-à-dire que, moi j’ai assisté à tout cela depuis l’Amérique du Sud, donc en Amérique du Sud, il faut bien voir que, je crois en 2018 la pauvreté extrême était estimée à 57 millions de personnes, et nous arrivons aujourd’hui à un chiffrage à 83,4 millions de personnes, pour combien de centaines de milliers de cas ? C’est-à-dire de pauvreté extrême où les gens n’ont plus de quoi se nourrir ni nourrir leurs enfants.

C’est une situation apocalyptique que j’ai vécu, ayant beaucoup beaucoup aidé, ici, les gens à se nourrir, parce que tout simplement un confinement, qu’est-ce que cela signifie ?

Cela signifie : plus aucun revenu ! Il n’y a pas de chômage, pas d’aide financière, pas d’aides sociales.

Il n’y a pas de retraites, les gens ils vivent au jour le jour.

Donc, en fait, on atteint dans le raisonnement un premier principe qu’on n’a pas le droit de contredire, donc ça c’est très problématique, parce que quand même, je crois que beaucoup de médecins ne sont pas d’accord avec ce premier principe, donc on devrait pouvoir en débattre.

Ensuite, des moyens sur lesquels nous n’avons pas le droit de réfléchir ni encore une fois de débattre, et qui en fait sont d’une logique qui est : « la fin justifie les moyens ».

Alors ça veut dire quoi ? Philosophiquement parlant, « la fin justifie les moyens » ?

Ça veut dire : « on a le droit de prendre comme un moyen ce qui n’en est pas un »

« La fin justifie les moyens », ça veut dire : « j’ai le droit de tuer au nom d’une cause plus grande ».

Bah non en fait ! Non ! Ou « j’ai le droit de torturer au nom d’une cause plus grande ». Non !

Et c’est un adage politique de tyrans. Alors la situation dans laquelle nous nous trouvons, donc…

Pierre :

Mais comment expliquez-vous qu’il y ait une telle docilité ?

Comment expliquez-vous qu’en Europe ce que vous dites qui semble être le bon sens, juste ce qui devrait nous révolter ou révolter tout le monde, comment expliquez-vous une telle acceptation de cette tyrannie ?

Ariane :

Les tyrans ont plus d’un tour dans leur sac pour soumettre les foules.

Et cette année est le symptôme d’une dégénérescence dans laquelle nous sommes depuis très longtemps.

Moi déjà en 2010, dans un livre, je parlais de « démocratie totalitaire »,

Bah aujourd’hui, je vais vous le dire : on est carrément dans le totalitarisme, ce n’est plus la peine de parler de démocratie, car l’opinion du peuple et son consentement : on s’en fout !

L’État décide pour vous. Ce que vous faites, où vous allez, ce que vous avez le droit de boire ou pas, puisque maintenant ici, en tout cas il y a eu la loi sèche, interdiction de vendre de l’alcool.

L’État décide qui vous avez le droit de voir, qui vous n’avez pas le droit de voir, l’État décide pour vous.

L’État pense pour vous.

L’État s’intruse dans l’intime pour vous.

Et donc ce pouvoir tyrannique, moi j’appelle toujours les tyrans « les passionnés du pouvoir ».

C’est-à-dire que la philosophie morale et politique, elle sait très bien que ceux qui aspirent au pouvoir en général, ce ne sont pas des hommes vertueux.

Et que les hommes vertueux fuient le pouvoir, parce qu’ils connaissent le difficile exercice du pouvoir.

C’est Kant qui dit qu’il existe deux exercices incroyablement difficiles, sans doute les plus difficiles au monde, c’est gouverner et éduquer.

Donc on peut revenir même à Platon qui disait qu’il faudrait donner le pouvoir aux philosophes, mais qui précisément, parce qu’ils sont philosophes, ils n’en voudraient pas !

Donc, aujourd’hui, nous n’avons certainement pas des hommes vertueux au pouvoir, et nous avons aussi quelque chose d’assez inédit dans les manipulations de masse, parce que de tout temps on cherche à manipuler les masses, c’est la rencontre entre des techniques de propagande très élaborées, une connaissance du psychisme humain très élaboré, et en face des peuples qui ont été dépossédés de leur accès à l’analyse de la rhétorique, de leur accès à l’analyse de leurs émotions, de leur accès à tout simplement l’analyse de la manipulation des discours.

Et je crois que c’est très important car je relisais Cicéron dans Les Tusculanes qui dit bien que la philosophie est une médecine de l’âme car elle nous enseigne à nous méfier de nos émotions, parce que, qu’est-ce qu’il se passe ?

Nous avons un management à la peur, et ce management à la peur nous fait faire table rase de questions profondément métaphysiques sur la vie humaine.

C’est-à-dire, qu’est-ce que vivre ? Est-ce que vivre, c’est survivre ?



Lire le texte complet ici, très intéressant:

https://www.reinfocovid.fr/interview-ariane-bilheran/