AFTERMATH: Texte #5
Publié : 20 avr. 2020, 18:32
AFTERMATH: Texte #5 ''La sélection naturelle''
Ça y est. On le sent. Nous y sommes. Déjà, près de la fin-avril, on le sent que cette crise amorce une nouvelle phase. Au moment d'écrire ces lignes; on le sent dans les médias, dans les réseaux sociaux, dans l'ambiance générale. La phase d'adrénaline est terminée. L'urgence qui nous a tenu à vif, sur la planète entière, n'a plus le même élan. Oh, bien sûr, c'est différent pour chacun; selon le métier, le contexte familial, la région, le pays, tout ça... Mais, globablement, le rush d'adrénaline, le côté réactif, c'est bel et bien derrière nous.
Maintenant, quoi, la suite. Reprendre son souffle. Pas trop, juste un peu. Un peu de vie normale. On pige dans ce qu'on peut, ce qu'il reste de vie normale après la tornade qui vient d'arracher notre vie quotidienne.
Pour plusieurs, retourner à une vie normale c'est retourner à une vie normale ''au plus câlisse''. Comme après une séance au cinéma, un souper de famille, des petites vacances ou un gros voyage... Hop, c'est terminé, on retourne travailler, on retourne à ses affaires. Par contre, ce coup-ci, ça dépend un peu beaucoup des autres. Les autres c'est surtout les gouvernements, la ''société'', qui barre tout ou presque, de ce retour à la vie normale tant espéré. On parle désormais de déconfinement graduel. On parle de distanciation sociale sur le long terme. On parle d'y aller par étapes. On ne voit ''câlissement pas le boutte''...
La sélection naturelle, donc. J'y arrive. Un des derniers tabous ? La mort.
Dans l'urgence, sous l'effet de l'adrénaline, la solidarité contre le spectre de la mort était totale, ou presque. À l'unison nous nous battions contre un ennemi, un virus mortel pour l'espèce humaine. C'était glorieux, épique, par bout.
Maintenant que la vie normale veut reprendre sa place, la solidarité montre des signes de fatigue. ''C'est qui l'osti qui veut pas que j'retourne vivre normalement?!''. C'est le vieux monsieur de 86 ans, juste là, là. C'est lui qui ralenti le troupeau.
Savez-vous ce qui arrive, dans le règne animal, lorsqu'il y en a un qui est blessé ou trop vieux? Il est laissé derrière. Un sacrifice naturel, en marche depuis des millions d'années, pour assurer la survie du troupeau et, plus largement, l'espèce au complet. De toute beauté, hein? Y a des documentaires pis des livres tout plein sur le sujet, allez-y, vérifiez.
J'dis ça de même. Loin de moi l'intention de fâcher les petites madames de St-Bruno avec des platitudes cruelles sorties de National Geographic... Mais pendant ce temps là, sachez que le #OKboomer vient de laisser sa place à #BoomerRemover, dans l'écosystème de l'Homo Sapiens.
On passe donc officiellement de l'insulte à la menace.
Cruel? De nos yeux d'humains sensibles, oui. Du point de vue de la Nature avec un ''N'' majuscule, c'est juste business as usual. C'est le troupeau qui commence à discuter pour laisser le vieux blessé derrière. Je peux vous enrober ça de sucre et planter des sprinkles de chocolat su'l top, mais c'est vraiment ça: C'est le troupeau qui commence à discuter pour laisser le vieux blessé derrière. L'homme est un animal, vous vous rappelez? Allez-y, vérifiez, je vous attends.
Je le sens venir ce texte là, depuis que j'ai commencé cette série Aftermath. Un moment donné, inévitablement, j'allais en parler de la sélection naturelle... Cette salope de mécanique de la vie qui fait chier les gens émotifs et sensibles. Dont je suis. Faut-il sacrifier des ''vieux'' ? On trace la ligne où, au juste? C'est quoi un vieux? Apparement, ma chère maman, du haut de ses 69 ans, ne considère pas faire partie de ce club. De manière assez ironique, elle penche en faveur d'un -soyons diplomate- ''relâchement'' vis-à-vis les efforts pour garder les vieux en vie... Mettons que 69 ans c'est pas vieux. 75 ans ça l'est? 80 ans peut-être? Est-ce que tu peux avoir 82 ans et être moins vieux qu'un jeune de 64 ans? Mentalement ou physiquement, j'veux dire... Au delà des chiffres... Ça fonctionne comment tout ça?
Bref, vous voyez où je veux en venir. Nul part. Précisément, nul part. Parce qu'il n'y a pas, et il n'y aura jamais, de réponse à ces questions. On ne peut pas véritablement tracer la ligne. Il n'y a pas de date d'expiration. Un être humain ce n'est pas un pot de yogourt. De toute manière, peu de gens le savent mais certains pots de yogourt deviennent plus savoureux un peu passé la date d'expiration. Ne me remerciez pas, je l'ai appris par accident. Mais ce n'est pas par accident que j'ai appris qu'il y a des vieux encore très bons et des jeunes qui sont bons pour la poubelle. N'allez pas croire que je souhaite à ces jeunes de crever du virus, ils sont juste cons et habituellement on n'en meurt pas, de ce virus là. Mais il est contagieux en osti, par contre.
Je sacre beaucoup dans ce texte parce que je suis en colère contre deux choses en même temps. Je suis en colère contre la Nature qui a toujours raison, et je suis en colère contre les jeunes cons qui pensent avoir raison sans connaitre la vraie raison, et de la contradiction dans toute cette longue phrase...
Je suis surtout en colère contre la vie qui s'entête à mourir tout le temps, juste pour mieux assurer qu'elle puisse continuer à vivre. Je suis en colère contre le sacrifice de ces pots de yogourt parfaitement délicieux.
C'est peut-être ça, la nouvelle phase de cette crise qui débute. Une phase de colère sourde. Le combat sous-marin qui se prépare, entre la vie et la mort.
Ça y est. On le sent. Nous y sommes. Déjà, près de la fin-avril, on le sent que cette crise amorce une nouvelle phase. Au moment d'écrire ces lignes; on le sent dans les médias, dans les réseaux sociaux, dans l'ambiance générale. La phase d'adrénaline est terminée. L'urgence qui nous a tenu à vif, sur la planète entière, n'a plus le même élan. Oh, bien sûr, c'est différent pour chacun; selon le métier, le contexte familial, la région, le pays, tout ça... Mais, globablement, le rush d'adrénaline, le côté réactif, c'est bel et bien derrière nous.
Maintenant, quoi, la suite. Reprendre son souffle. Pas trop, juste un peu. Un peu de vie normale. On pige dans ce qu'on peut, ce qu'il reste de vie normale après la tornade qui vient d'arracher notre vie quotidienne.
Pour plusieurs, retourner à une vie normale c'est retourner à une vie normale ''au plus câlisse''. Comme après une séance au cinéma, un souper de famille, des petites vacances ou un gros voyage... Hop, c'est terminé, on retourne travailler, on retourne à ses affaires. Par contre, ce coup-ci, ça dépend un peu beaucoup des autres. Les autres c'est surtout les gouvernements, la ''société'', qui barre tout ou presque, de ce retour à la vie normale tant espéré. On parle désormais de déconfinement graduel. On parle de distanciation sociale sur le long terme. On parle d'y aller par étapes. On ne voit ''câlissement pas le boutte''...
La sélection naturelle, donc. J'y arrive. Un des derniers tabous ? La mort.
Dans l'urgence, sous l'effet de l'adrénaline, la solidarité contre le spectre de la mort était totale, ou presque. À l'unison nous nous battions contre un ennemi, un virus mortel pour l'espèce humaine. C'était glorieux, épique, par bout.
Maintenant que la vie normale veut reprendre sa place, la solidarité montre des signes de fatigue. ''C'est qui l'osti qui veut pas que j'retourne vivre normalement?!''. C'est le vieux monsieur de 86 ans, juste là, là. C'est lui qui ralenti le troupeau.
Savez-vous ce qui arrive, dans le règne animal, lorsqu'il y en a un qui est blessé ou trop vieux? Il est laissé derrière. Un sacrifice naturel, en marche depuis des millions d'années, pour assurer la survie du troupeau et, plus largement, l'espèce au complet. De toute beauté, hein? Y a des documentaires pis des livres tout plein sur le sujet, allez-y, vérifiez.
J'dis ça de même. Loin de moi l'intention de fâcher les petites madames de St-Bruno avec des platitudes cruelles sorties de National Geographic... Mais pendant ce temps là, sachez que le #OKboomer vient de laisser sa place à #BoomerRemover, dans l'écosystème de l'Homo Sapiens.
On passe donc officiellement de l'insulte à la menace.
Cruel? De nos yeux d'humains sensibles, oui. Du point de vue de la Nature avec un ''N'' majuscule, c'est juste business as usual. C'est le troupeau qui commence à discuter pour laisser le vieux blessé derrière. Je peux vous enrober ça de sucre et planter des sprinkles de chocolat su'l top, mais c'est vraiment ça: C'est le troupeau qui commence à discuter pour laisser le vieux blessé derrière. L'homme est un animal, vous vous rappelez? Allez-y, vérifiez, je vous attends.
Je le sens venir ce texte là, depuis que j'ai commencé cette série Aftermath. Un moment donné, inévitablement, j'allais en parler de la sélection naturelle... Cette salope de mécanique de la vie qui fait chier les gens émotifs et sensibles. Dont je suis. Faut-il sacrifier des ''vieux'' ? On trace la ligne où, au juste? C'est quoi un vieux? Apparement, ma chère maman, du haut de ses 69 ans, ne considère pas faire partie de ce club. De manière assez ironique, elle penche en faveur d'un -soyons diplomate- ''relâchement'' vis-à-vis les efforts pour garder les vieux en vie... Mettons que 69 ans c'est pas vieux. 75 ans ça l'est? 80 ans peut-être? Est-ce que tu peux avoir 82 ans et être moins vieux qu'un jeune de 64 ans? Mentalement ou physiquement, j'veux dire... Au delà des chiffres... Ça fonctionne comment tout ça?
Bref, vous voyez où je veux en venir. Nul part. Précisément, nul part. Parce qu'il n'y a pas, et il n'y aura jamais, de réponse à ces questions. On ne peut pas véritablement tracer la ligne. Il n'y a pas de date d'expiration. Un être humain ce n'est pas un pot de yogourt. De toute manière, peu de gens le savent mais certains pots de yogourt deviennent plus savoureux un peu passé la date d'expiration. Ne me remerciez pas, je l'ai appris par accident. Mais ce n'est pas par accident que j'ai appris qu'il y a des vieux encore très bons et des jeunes qui sont bons pour la poubelle. N'allez pas croire que je souhaite à ces jeunes de crever du virus, ils sont juste cons et habituellement on n'en meurt pas, de ce virus là. Mais il est contagieux en osti, par contre.
Je sacre beaucoup dans ce texte parce que je suis en colère contre deux choses en même temps. Je suis en colère contre la Nature qui a toujours raison, et je suis en colère contre les jeunes cons qui pensent avoir raison sans connaitre la vraie raison, et de la contradiction dans toute cette longue phrase...
Je suis surtout en colère contre la vie qui s'entête à mourir tout le temps, juste pour mieux assurer qu'elle puisse continuer à vivre. Je suis en colère contre le sacrifice de ces pots de yogourt parfaitement délicieux.
C'est peut-être ça, la nouvelle phase de cette crise qui débute. Une phase de colère sourde. Le combat sous-marin qui se prépare, entre la vie et la mort.